
L'abandon des chiens. Le magasine N°3
À propos
Chaque été, les refuges font face à une même urgence : l’abandon. Trop d’animaux sont laissés sur le bord de la route, dans un box, ou confiés à des associations débordées. Ce mois-ci, j’ai eu la chance de m’entretenir avec la responsable de la communication et de la maltraitance de la SPA de Strasbourg. Une femme engagée, au discours sans détour, qui nous livre ici un témoignage à la fois lucide et porteur d’espoir. Parce qu’abandonner un chien, ce n’est pas un simple acte logistique : c’est un déchirement — pour l’animal, pour l’équipe, et souvent, pour celui qui n’a pas mesuré l’engagement que représente une vie à quatre pattes.
L’abandon : une réalité encore trop banalisée
"Je ne l’abandonne pas, je vous le confie." Cette phrase, entendue trop souvent à la SPA, illustre bien la confusion entre dépôt volontaire et véritable abandon. Derrière les raisons invoquées — divorce, déménagement, naissance, ou difficultés financières — se cache souvent une adoption impulsive, mal préparée, ou guidée par l’esthétique d’un chien à la mode. L’interview révèle à quel point les refuges comme celui de Strasbourg doivent gérer, au quotidien, les conséquences de décisions prises à la légère. Les animaux, eux, ne comprennent pas. Ils attendent, ils espèrent. Et les équipes, elles, font face, avec une dignité et une résilience admirables.
Agir plutôt qu’abandonner
Heureusement, il existe des alternatives concrètes et accessibles pour ne jamais avoir à envisager l’abandon.
Des solutions de garde :
-
Pensions canines : agréées, professionnelles, avec de l’espace.
-
Dog-sitting à domicile : via des plateformes comme Holidog, Animaute, ou des groupes locaux.
-
Échange entre particuliers : “Tu gardes mon chien cet été, je garde le tien à Noël”.
Voyager avec son chien, c’est possible :
De plus en plus de logements de vacances sont dog-friendly, les campings et hôtels aussi. Avec un peu de préparation, tout devient plus simple. (👉 Relire notre guide pratique des vacances avec son chien, publié en juin.)
Rencontre avec la SPA de Strasbourg : réalités, abandons… et espoir
Q : Constatez-vous une augmentation des abandons ?
R : Oui, mais il faut nuancer. L’été, on observe une baisse des adoptions, ce qui donne l'impression qu'il y a plus d'abandons. En juillet, Strasbourg se vide, et les animaux restent plus longtemps. Cela coïncide souvent avec l'arrivée à maturité des chatons nés au printemps.
Q : Quelles sont les raisons principales avancées par les personnes qui abandonnent ?
R : Ce sont rarement des "excuses" dans leur tête. Il y a l'agressivité de l'animal, des difficultés financières, une naissance, un divorce, un déménagement, ou un placement en maison de retraite. Souvent, le problème vient de là : l’animal n’a pas été adopté dans de bonnes conditions.
Q : Certains abandonnent en pensant qu'ils ne font rien de mal ?
R : Oui. Ils disent "je ne l’abandonne pas, je vous le confie". Il y a cette idée que la SPA est là pour ça. Comme on change de voiture ou de partenaire. C’est une forme de consommation de l’animal. Mais pour nous, c’est un véritable déchirement à chaque fois.
Q : Les races tendance comme le Malinois posent-elles des problèmes particuliers ?
R : Absolument. Les Malinois, les Américans, les chiens catégorisés… On voit passer des adoptions "Instagram". Les gens ne mesurent pas l’énergie et l’éducation que ces chiens demandent. Très vite, ça déborde.
Q : Comment se passe un abandon ?
R : Aujourd’hui, on évite que les personnes accompagnent l’animal jusqu’à la cage. C'est trop dur pour tous. On essaie d’agir vite pour limiter la souffrance. Et l’équipe est très soudée. On se soutient. Les salariées, les bénévoles, tout le monde agit pour que ces animaux soient entourés.
Q : Certains chiens restent longtemps ?
R : Oui. Certains sont là depuis 5 ou 6 ans. Le record était un chien resté 13 ans. On essaie de leur offrir une vie digne ici. Ils ont souvent leur "fan club" de bénévoles qui les sortent régulièrement.
Q : Y a-t-il des retours heureux ?
R : Heureusement ! Des nouvelles de chiens adoptés, des photos, des petits mots. Certains adoptants deviennent même des amis. C’est ce qui nous donne la force de continuer.
Q : Quelle est la procédure d’adoption aujourd’hui ?
R : Elle s’est durcie. Il y a un certificat d’engagement de 6 pages, un délai légal de 7 jours, parfois des pré-visites de contrôle. On préfère une adoption réfléchie qu’un coup de cœur. On discute à fond avec les potentiels adoptants pour que ça colle.
Q : Et les chats ?
R : Les chats sont plus nombreux aujourd’hui qu’avant. Il y a les portées non désirées, les animaux errants non réclamés, les abandons classiques… Et malgré la stérilisation faite depuis 30 ans, la surpopulation reste un vrai souci.
Q : Et les NACs (lapins, rongeurs...) ?
R : Oui, c’est une réalité grandissante. Lapins, cochons d’Inde, octodons, tortues… Ils sont parfois achetés sur un coup de tête puis abandonnés tout aussi vite. Mais ce sont des vies. Et ils méritent aussi du respect et de l’engagement.
Q : Comment peut-on vous aider concrètement ?
R : En adoptant, bien sûr, mais surtout en parlant, en relayant nos contenus sur les réseaux, en donnant, en devenant bénévole. Strasbourg n’est pas la SPA nationale de Paris. Nous vivons de dons, de solidarité locale. Et chaque geste compte.
Agir, chacun à notre mesure
Mais cet entretien n’est pas qu’un constat : c’est aussi un appel à la mobilisation. Car chacun peut faire quelque chose. Partager cet article, parler de la réalité des refuges, s’engager comme bénévole, faire un don, ou adopter de manière réfléchie… Autant de gestes qui peuvent changer une vie. La SPA de Strasbourg ne bénéficie pas du soutien massif de la SPA nationale : elle vit grâce à la générosité locale. Alors, à notre échelle, soyons relais de cette solidarité. Comme le dit si bien la responsable :
« Ce sont des vies. Et elles méritent du respect, pas un abandon. »
🙏 Un immense merci à la responsable de la SPA de Strasbourg pour son temps, sa transparence, et surtout pour son engagement. Si cet article vous touche, n’hésitez pas à le partager autour de vous.
🐶 Nathalie